PATRIMOINE/ Marché de l'art
PHOTOGRAPHIE
L'il surréaliste
Porté par la vente de la collection d'André Breton, le chiffre
d'affaires du marché s'élève aujourd'hui à 5,3 millions
d'euros.
L'émergence du marché de la photographie surréaliste est
plutôt tardive mais particulièrement rapide. La hausse des prix n'est
apparue qu'en 1997. Depuis, le marché attire d'autant plus les collectionneurs
qu'il est soutenu par des manifestations, comme l'importante rétrospective
du musée national d'Art moderne de Paris en 2002, organisée en parallèle
avec une exposition au Metropolitan Museum of Art à New York et par des
ventes très médiatiques comme celle de la collection d'André
Breton en 2003.
550 000 euros pour Noire et Blanche de Man Ray
De tels événements ont, du coup, fait grimper les prix lors des
ventes publiques : +178 % entre janvier 1997 et janvier 2004. Quant aux transactions,
elles sont passées entre 1992 et 2004 de 200 lots échangés
par an à près de 600. Résultat : le chiffre d'affaires a
quadruplé en dix ans, pour atteindre 5,3 millions d'euros en 2003.
En France, le marché de la photographie surréaliste a été
en outre stimulé par la dispersion de la collection d'André Breton,
le 15 avril 2003, qui comprenait de nombreuses oeuvres historiques recherchées
par les amateurs du monde entier. Le fonds comptait notamment 74 lots de tirages
exceptionnels de Man Ray, figure de proue du mouvement, dont certains ont vu leur
prix décupler par rapport aux estimations les plus optimistes. Des records
sont par ailleurs tombés au cours de la vente. Les plus notables : 185 000
euros pour La Poupée (1936), de Hans Bellmer; 130 000 euros
pour Parabolaoptica (1934), de Manuel Alvarez Bravo ; et 95 000 euros
pour Le Triomphe de la stérilité ou Penthésilée
(1937), de Raoul Ubac. Toutefois, aucun cliché n'a atteint les 550 000 euros
obtenus, en 1998, par Noire et Blanche (1926), de Man Ray, qui demeure la photo
surréaliste la plus chère à ce jour. Sous le feu des enchères,
les tirages des plus rares ont très largement dépassé les
estimations. Ainsi, La maison que j'habite, ma vie, ce que j'écris,
un cliché de Brassaï réalisé en 1934 et utilisé
par Breton pour illustrer L'Amour fou, s'est arraché à 21 000 euros,
au quadruple des estimations. Même Cristaux, une autre photo de Brassaï
reproduite dans la revue Le Minotaure, estimée entre 1 200
et 1 500 euros, s'est envolée à 9 000 euros. Mais
l'un des résultats les plus éblouissants revient à Claude
Cahun : son cliché Les Mains (1936) est parti à 28 000 euros,
alors qu'il était estimé entre 800 et 1 000 euros ! A l'issue
de cette vente, la cote de nombreux photographes surréalistes a connu un
véritable coup de fouet. Notamment celle de Hans Bellmer, qui a progressé
de 185 % en 2003 !
Capteurs d'images |
Fédéré par André Breton en 1924. le mouvement
surréaliste est à l'origine littéraire.
Rapidement, y adhèrent des plasticiens tels Max Ernst, Jean Ara et Man
Ray. Leur première exposition a lieu en 1925. Les images sont fondées
sur le subconscient, le rêve et le fantastique. Le principe d'automatisme
propre à l'écriture littéraire est recherché en arts
plastiques dans de nombreuses techniques. La photographie permet à Man
Ray, Bellmer, Bayer, Kertész, Brassaï ou Molinier de capter l'image
et les sensations sur le vif. |
Des amateurs gâtés
Toutefois, après cette fantastique flambée, les prix tendent
à baisser actuellement : - 32 % entre janvier 2004 et septembre 2005. Les
enchères d'exception se sont raréfiées. En 2004, seuls trois
records ont été décrochés, contre sept un an plus
tôt : 68 000 euros pour Marcel Duchamp, avec Portraits multiples,
le 9 juin 2004, lors de la vente Artcurial, 40 000 dollars (32 000 euros)
pour Claude Cahun, à New York, et 8 000 livres (11 700 euros)
pour Edouard Léon Théodore Mesens. Depuis début 2005, seul
Pierre Molinier a réussi à obtenir un prix record avec Le Chaman,
variante, cliché adjugé 7 200 euros le 8 juin. Le marché
de la photographie surréaliste abonde aussi en clichés aux tarifs
abordables. En dehors des stars du mouvement, les amateurs peuvent encore trouver
d'intéressantes épreuves à moindres frais de Jacques-André
Boiffard, Georges Hugnet, Edouard Léon Théodore Mesens, Claude Cahun,
Karel Teige ou Jindrich Heisler.
copyright ©2005 La Vie Financière
|